Maison Communauté Le poussin scolaire

Le poussin scolaire


Nicole Davidson

Quand mes filles fréquentaient l’école primaire, il était courant, dans le temps de Pâques, de faire naître des poussins en classe pour expliquer la couvaison aux enfants. Les poussins étaient ensuite tirés au sort pour les élèves qui pouvaient les accueillir avec la permission de leurs parents.

Quelle ne fut pas la joie d’une de mes filles de revenir à la maison avec un oisillon tout mignon. C’était le plus faible de la couvée, mais l’enseignante avait cru bon de le donner à une famille capable de le réchapper puisque le papa, chez nous, était vétérinaire. Quelle fête pour accueillir un nouveau pensionnaire! Nous avions déjà des cochons d’Inde, des lézards, des souris blanches, des poissons dans un immense aquarium, sans compter les vaches à boucherie et les abeilles dans le champ!

Tout le monde travailla à l’installation d’un mini poulailler, sans encore une seule poule, puisqu’à la surprise générale, mon mari nous annonça que la future petite poulette était un mâle! C’était l’attraction de l’heure! Quand sa santé et sa vitalité ne firent plus aucun doute, nous lui avons procuré une famille de poules qu’il sembla accueillir avec beaucoup d’émotion! Je commençais à trouver que j’avais pas mal de bêtes à superviser. Les enfants manifestaient beaucoup de bonne volonté mais manquaient parfois de rigueur dans les soins à dispenser. Encore fallait-il, en plus de les nourrir, connaître leurs besoins et veiller à la propreté, à l’hygiène, etc.

Le poussin ne resta pas poussin bien longtemps; il devint un magnifique coq à la crête imposante qui se pavanait fièrement en toute liberté autour de la maison et de l’étable avec ses poules. Un coq dominateur! Il avait vraiment mauvais caractère et il avait tendance à m’attaquer à l’improviste en sautant sur moi! Malheur à lui!

Je ne voulais pas le réduire à l’emprisonner dans une cage, mais je ne pouvais pas non plus continuer à le subir. C’est donc en conseil de famille que nous prîmes la difficile décision non pas de le manger — tout le monde aurait été incapable d’en avaler une bouchée —, mais plutôt de le donner à un fermier du coin qui avait perdu son coq dans la gueule d’un renard.