
Sarah Mannarino
Résidente de Sainte-Adèle, maître en droit privé et avocate en France, certifiée au Barreau du Québec
Aujourd’hui, nous poursuivons notre exploration du divorce et abordons l’aspect contentieux de celui-ci. En effet, comme je l’avais souligné lors de ma dernière chronique: le divorce à l’amiable n’est pas forcément une option pour tous les couples mariés qui se séparent, et pour certains, seule la voie contentieuse est possible.
En effet, soit l’un des époux ne veut pas divorcer, soit les deux époux souhaitent divorcer, mais ne s’entendent pas sur les conséquences de la dissolution du mariage vis-à-vis de la séparation des biens, de la garde des enfants, etc.
Avant de poursuivre, il convient de préciser qu’au Québec, lorsque les époux ne sont pas d’accord, ils ne peuvent pas divorcer pour n’importe quelle raison. La loi prévoit en effet trois motifs valides pour divorcer: la séparation des époux depuis un an, l’adultère et la cruauté physique ou mentale.
Ainsi, l’époux qui souhaite divorcer devra prouver qu’il rencontre l’un de ces trois motifs. Devant ces situations, c’est un juge qui tranchera le litige en accordant (ou pas) le divorce à l’époux qui le demande, établira le montant de la pension alimentaire, la répartition des biens… On comprend ici à quel point cette procédure peut être intrusive et traumatisante.
À cette étape de notre exploration, il est essentiel de souligner que se faire assister par un avocat est le meilleur moyen d’assurer la protection des droits de l’époux qui demande le divorce.
Cette recommandation de se faire accompagner par un professionnel du droit s’applique en réalité à toute la durée de cette procédure, à la fois parce qu’elle présente beaucoup de détails juridiques, mais également parce qu’elle est traumatisante sur le plan émotionnel.
Il est évident que cet accompagnement a un coût: la facture moyenne d’un divorce avec non-consentement des parties peut être estimée entre 8000$ et 15 000$, mais encore là, il ne s’agit que d’une moyenne.
S’agissant de l’aspect financier d’une demande en divorce, au Québec, l’aide juridique offre un soutien juridique qui peut être gratuit ou ajusté selon les revenus. Ainsi, une personne célibataire sans enfant à charge sera admissible si son revenu est de 29 302$ ou moins.
Pour demander le divorce et commencer le processus, l’époux qui le souhaite doit rédiger sa demande et soumettre des documents à la Cour. La demande en divorce s’appelle officiellement une «demande introductive d’instance en divorce» et elle doit indiquer ce que l’époux cherche à obtenir à la fin du processus (que le divorce soit prononcé, le temps parental avec les enfants, la séparation des biens, etc.).
Une fois la procédure enclenchée, un protocole d’instance devra être déposé. Dans ce document, les époux indiquent ce qu’ils doivent faire et comment ils le feront avant de se rendre au procès. Parce que le chemin peut encore être long avant d’arriver au procès et surtout au jugement définitif – en moyenne la procédure de divorce non consenti dure entre 15 et 24 mois. Ce protocole permet donc de s’organiser pendant la durée de la procédure.
Lorsqu’enfin le jugement est rendu, le mariage est dissous, en théorie il n’en reste rien… sauf quelques exceptions relatives aux réversions des pensions de retraite. Sinon, chacun des époux est de nouveau libre d’organiser sa vie selon ses propres choix et pourquoi pas de se remarier.
Néanmoins, pour les couples qui ont toujours à leur charge des enfants, le lien doit pouvoir se maintenir pour permettre à ceux-ci de bénéficier de l’attention de leurs deux parents – une pension, un droit de garde. Tout ça va maintenir les époux dans la vie l’un de l’autre, ce qui peut également constituer un défi pour d’anciens amoureux qui ne le sont plus.
Nous achevons ici l’exploration du divorce et poursuivrons dans une prochaine chronique notre voyage dans les droits de la famille.