Maison Actualité L’hôtel La Belle Chaumière de Val-David

L’hôtel La Belle Chaumière de Val-David

Hôtel La Belle Chaumière derrière l’ancienne gare, 1948. Collection : Gaétan Garreau

Colette Paquin, Paul Carle et Michel Allard

 

Un gros projet de développement hôtelier

La Belle Chaumière était située juste derrière la gare de l’époque, à l’emplacement de l’actuel atelier municipal (ancienne caserne incendie et garage municipal) sur la rue de la Sapinière.

 Cette auberge de quatre étages était vouée à un bel avenir avec tous les projets de rénovation prévus par son propriétaire, M. Paul-Émile Quesnel.

« Son propriétaire, M. Paul Quesnel, est un jeune homme fort entreprenant. Son hôtel est situé dans une maison très vieille dont il s’est rendu possesseur le 20 décembre 1945[1]. Aujourd’hui, cette construction est complètement remise à neuf. Les touristes seront particulièrement à même de s’amuser dans la cave…

Entendons-nous : il s’agit d’une cave qui sort de l’ordinaire, avec un bar très moderne, un coin pour les jeux et surtout, un cachet spécial conféré par des murs en grosses pierres de taille et une cheminée monumentale.

« Ce n’est pas tout, M. Quesnel aura des appareils de gymnastique, un tennis et même deux chaloupes et un canot qui navigueront sur le lac de la Sapinière par permission spéciale des propriétaires de cet hôtel. Ces derniers ont aussi accordé à M Quesnel le privilège de posséder sur ce lac un bout de plage portant le nom de la Belle Chaumière.

« Monsieur Quesnel est rempli d’espérances. Il a travaillé avec une ardeur digne d’éloges pour doter Val-David d’un hôtel qui puisse répondre à l’afflux toujours grandissant des touristes vers cette région.

On peut espérer que ses efforts ne seront pas inutiles, quoique déjà quelques mois depuis l’ouverture de La Belle Chaumière, cet hôtel connaît un succès remarquable[2]. »

Monsieur Quesnel profite, pour son projet, de la proximité de la gare, comme dans de nombreuses municipalités à l’époque.

 

Projet de rénovations prévues avant l’incendie

Hôtel La Belle Chaumière derrière l’ancienne gare, 1948. Collection: Gaétan Garreau

En 1948, 20 chambres étaient déjà disponibles pour les visiteurs et M. Quesnel projetait d’en ajouter 10 autres. La construction de deux autres ailes était prévue. Mais tel quel, l’hôtel donnait déjà une idée des proportions intéressantes qu’il aura plus tard.

 

La salle à manger. Source : Le Devoir, 7 mai 1948

 

L’hôtel La Belle Chaumière a la réputation d’un lieu d’une extrême propreté et est remarqué pour ses lits confortables. Il comprend une salle à manger bien aérée, munie de grandes fenêtres.

 

 

Le bar. Source : Le Devoir, 20 mai 1948

 

 

Au sous-sol se trouve un bar, tandis qu’au deuxième, ceux qui aiment le repos au grand air peuvent aller s’étendre sur une vaste véranda.

 

 

 

Publicité parue dans Le Devoir, 17 juin 1948

 

Une protection incendie exemplaire

Le 7 mai 1948, un article paru dans Le Devoir soulignait l’installation de prévention des incendies réalisée par M. Quesnel:

« À une époque où des incendies désastreux rendent inquiets bon nombre de touristes dans les Laurentides, on apprendra avec doublement d’intérêt que l’hôtel de M. Quesnel est doté d’une installation préventive du dernier modèle.

Il s’agit du système Thermo-detek, en vertu duquel un thermostat a été installé dans chaque chambre. S’il fallait que la température de cette pièce monte à un degré dangereux, l’alarme serait immédiatement donnée par tout l’hôtel. Un tableau indicateur montre dans quelle partie de l’établissement les flammes ont éclaté tandis qu’une lumière allumée au-dessus de la porte indique la chambre vers laquelle il faut se diriger. De cette manière, les gardiens peuvent maîtriser les flammes avec un extincteur chimique quelques minutes seulement après qu’elles ont pris naissance. »

Incendie de La Belle Chaumière. Source : Le Devoir, 18 juillet 1949

Malgré toutes ces précautions, à peine un an plus tard, le samedi 16 juillet 1949, l’hôtel La Belle Chaumière est la proie de flammes. L’auberge n’a pu être sauvée de l’incendie, mais on peut supposer que le système de prévention des incendies ait permis de sauver toutes les personnes présentes.

« En moins d’une heure, des flammes se propageant avec la vitesse de l’éclair ont complètement détruit l’auberge La Belle Chaumière, tôt samedi matin. Plus de 40 personnes, pensionnaires et employés, eurent le temps de quitter l’hôtel sans subir aucune blessure. On croit que l’incendie aurait été causé par des fils électriques défectueux. Les flammes furent découvertes vers 8 h, samedi matin. Immédiatement, quelques-uns des employés qui travaillent dans la cuisine donnèrent l’alerte. Les pensionnaires de l’hôtel furent promptement éveillés et tous quittèrent l’auberge sans qu’il y eût de panique[3]. »

La police estima que les dommages étaient de l’ordre de 100 000 $ à 125 000 $. La gare du CPR, située tout près, et plusieurs autres cottages subirent également des dommages. La rapide intervention des pompiers de Val-David, Val-Morin et Sainte-Agathe a empêché que des dommages sérieux ne soient causés aux édifices environnants. Il semble que les citoyens vinrent en aide aux pompiers pour combattre les flammes.

Cet incendie mit fin à l’avenir prometteur de La Belle Chaumière et obligea M. Quesnel à faire cession de ses biens en date du 15 août 1949, tel qu’en fait foi la loi sur la faillite publiée dans L’avenir du nord le 26 août 1949.

Publié dans L’avenir du nord le 26 août 1949

Aucune information ne fut trouvée sur ce que M. Quesnel a fait par la suite, ni même s’il est demeuré à Val-David ou dans les environs.

L’incendie de l’auberge coûta cher à la Municipalité : 145 $ pour l’aide des pompiers de Sainte-Agathe et 225 $ pour l’aide des pompiers de Val-Morin, qui seront versés en 1949. Les pompiers de Val-David (uniquement volontaires à cette époque) forment une association au cours de l’automne 1949. Le résultat de leur première élection est le suivant : Alfred Dufresne est nommé chef, Roméo Gareau est nommé sous-chef, et Sylva Noël est nommé secrétaire de l’association; les pompiers sont alors Engelbert Leroux, opérateur de la pompe, Gustave Cordeau, René Davidson, Stolan Davidson, René Frenette, Joseph Leroux, Marc Leroux, Georges Yarushevfky, et Marcel Ouimet[4]. Ce fut le début d’un véritable service d’incendie chez nous[5].

 

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[1] Paul-Émile Quesnel acquiert finalement cette propriété le 19 février 1946. Elle a fait partie des biens d’Isaïe Deschamps au début du XXe siècle et dans les premières années du village.

[2] Extraits : Le Devoir, 7 mai et 17 juin 1948

[3] Extrait : La Presse, 18 juillet 1949

[4] Informations extraites de M.A. Dufresne, Val-David, fragments d’histoire, 1996

[5] https://histoirevaldavid.com/histoire-des-pompiers-de-val-david/