
Paul Carle et Denis Vézina, historiens
Philippe Belleteste est le premier à être nommé directeur de La Sapinière. La création de ce poste allège les tâches des propriétaires, Jean-Louis et Bobie Dufresne, et leur permet de voyager, notamment en Italie et pour certaines cures en hiver. Originaire d’Orléans, en France, Philippe Belleteste arrive au Canada en juin 1964 après avoir étudié à la prestigieuse École hôtelière de Suisse. Il trouve rapidement du travail au Québec. Il travaille à L’Estérel, à Saint-Marguerite-du-Lac-Masson, lorsque Jean-Louis Dufresne l’engage en 1966; il sera successivement contrôleur, gérant et enfin directeur de La Sapinière.
Objectif : renchérir la cave à vin
Rapidement, plusieurs objectifs de Philippe Belleteste deviennent ceux de l’institution. D’abord le vin. L’objectif est de faire en sorte que chaque table consomme une bouteille de vin tous les soirs, même si la vente de ces bouteilles ne rapporte que 1 $ de profit chacune. Pour ce faire, la qualité des consommations doit s’améliorer et se diversifier au-delà des bouteilles de St-Georges, de Mateus et de Royal de Neuville. Philippe Belleteste entreprend ce travail en allant 3 ou 4 fois par année en Europe pour choisir des cépages. Bientôt, la cave de La Sapinière comprend plus de 25 000 bouteilles, la plus importante au Québec et au Canada. Le succès est manifeste, si bien que La Sapinière offre des cours à des clients, organise des soirées d’initiation et de dégustation, ce qui attire d’autres restaurateurs et hôteliers. La Sapinière engage un sommelier prestigieux, Jacques Orhon, auteur de plus d’une vingtaine d’ouvrages sur le vin dont quatre sont même traduits en chinois.
Objectif : obtenir une reconnaissance Relais & Châteaux
Un second objectif de Philippe Belleteste est d’entreprendre des négociations en Europe afin de faire reconnaître La Sapinière comme le premier établissement en Amérique du Nord à porter le label prestigieux de Relais & Châteaux (auparavant Relais de campagne). Cet objectif est atteint dans les années 1970 (probablement en 1975).
Un premier « tout compris »
Sous la direction de Philippe Belleteste, La Sapinière devient le paradis québécois du voyage de noces. Certaines clauses de l’impôt de l’époque font en sorte que novembre est le mois favori des jeunes mariés. Pour l’occasion, La Sapinière offre un plan américain, l’ancêtre du « tout compris », incluant trois repas par jour de la meilleure nourriture. Il développe également la formule « séminaire » proposant des séjours du dimanche soir au vendredi à des groupes de 30 à 40 personnes pour des activités professionnelles de formation ou de développement. Cette formule est particulièrement prisée par la clientèle des compagnies pharmaceutiques.

Soupers Escoffier et Prosper Montagné
Philippe Belleteste poursuit et améliore l’organisation des premiers grands soupers gastronomiques à La Sapinière dont les soupers Escoffier, ceux de la Confrérie des Braouliens et des Ripailleurs laurentiens. Il participe également à l’élaboration du film La Gastronomie tourné en 1972 par l’Office national du film autour du souper du Club Prosper Montagné et diffusé à partir de 1976.
Regrouper les hôtels des Laurentides
Philippe Belleteste poursuit le travail à l’organisation du regroupement Laurentien Resorts, qui réunit 22 des principaux établissements hôteliers des Laurentides dans un souci de complémentarité et de saine concurrence. Ce regroupement permet l’échange de clients dans le plan américain des établissements, l’organisation et la diffusion de formations aux employés, et il permet la création d’une centrale d’achats pour les établissements membres. Cet organisme se charge également de la publicité touristique dans les Laurentides. Ainsi, chaque année, une journée est consacrée à la réception de quelque 400 journalistes pour visiter et goûter un buffet préparé par plus de 20 grands chefs de la région. Cet événement incite les journalistes à publier au cours de l’année près de 300 articles vantant la qualité de l’accueil laurentien dans des journaux et revues.

École hôtelière
Philippe Belleteste quitte La Sapinière en 1979. Cette même année, Jean-Louis Dufresne et Bobie proposent à Philippe Belleteste, qu’ils considèrent comme un fils, une association à l’entreprise Hôtel la Sapinière. Celui-ci refuse l’offre puisqu’il préfère se consacrer au développement de l’École hôtelière des Laurentides, d’abord à la polyvalente des Monts, à Sainte-Agathe, puis dans ses propres locaux à Sainte-Adèle. Ses liens privilégiés avec Gérard Delage et Henri-Paul Garceau, du réseau d’hôtellerie du Québec, lui permettent de développer ce nouveau secteur éducatif.
C’est donc dans le giron de La Sapinière que naît l’idée d’une école de l’hôtellerie et de la gastronomie au Québec, autour de Gérard Delage, Henri-Paul Garceau, Philippe Belleteste et Jean-Louis Dufresne. Au cours des ans, l’École hôtelière des Laurentides maintient des liens privilégiés avec La Sapinière puisque plusieurs de ses employés, chefs, sous-chefs et sommeliers y enseignent grâce à cette proximité avec Philippe Belleteste.